CN 1184, 555000 / 188770. Altitude 445 m
Date des fouilles: août 2012.
Références bibliographiques: CAF 5, 2003, 228s.
Analyse de sauvetage (travaux de réfection urgents: arc arraché le 2 juillet 2012 par le passage d'un camion). Surface de la fouille 40 m².
Fortification urbaine.

Suite aux dégâts dus à un camion, il a été possible de compléter au rez-de-chaussée les analyses des élévations de la porte des Dominicaines, déjà effectuées dans les niveaux supérieurs.
Les sources historiques nous révèlent que le couvent des Dominicaines s'est implanté à Estavayer-le-Lac dès 1317, grâce au legs par Guillaume d'Estavayer, le 8 décembre 1316, de sa propriété se situant «dans le bourg neuf d'Estavayer, dit des Chavannes, du côté de Payerne, près de la maison du seigneur Renaud, son cousin, coseigneur d'Estavayer, près de la route de Payerne et juste au-dessus des nouveaux fossés du dit bourg d'Estavayer» (archives des Dominicaines, parchemin conservé sous la cote A ᵇ 11). Les «nouveaux fossés» indiquent que le faubourg de maisons en bois - Chavannes signifie en effet cabanes -, originellement ouvert, a été fortifié et intégré peu auparavant à la ville, ce que confirment les analyses des élévations de la porte des Dominicaines complétées par des datations dendrochronologiques.
La première construction à l'entrée de la ville est une tour-porte ouverte à la gorge qui ne comprenait qu'un seul niveau en blocs de grès appareillés. Les parois latérales d'une profondeur de 3 m, édifiées sur les lices, se raccordaient à la braie et non à l'enceinte principale, visiblement renforcée dès l'origine par une zone de lices bordée de braies précédant le fossé. La construction de l'étage de cette première porte respecte la disposition primitive au nord (placée dans l'axe du lac), mais à l'opposé le mur a été prolongé jusqu'au niveau de l'enceinte, soit sur la profondeur actuelle de 8 m hors œuvre. Datée, avec réserves, après 1269, cette étape correspond sans doute au début de l'occupation du site par Guillaume et Renaud d'Estavayer. La tour-porte atteignait alors une hauteur de 9 m et elle était munie d'une bretèche au nord (latrines?), donnant sur le fossé. La fenêtre trilobée qui surmonte encore l'arcade côté campagne trouve ses modèles dans les parties les plus anciennes du château de Chenaux.
La tour-porte a acquis sa forme actuelle suite à l'implantation du couvent des Dominicaines: les bois mis en œuvre dans la nouvelle construction ont été abattus durant l'automne/hiver 1319/20. D'une largeur de 4.50 m pour une profondeur de 6.10 m dans l'œuvre, la construction atteignait une hauteur d'au moins 13.50 m, son couronnement primitif ayant été écrêté. Elle était dotée, sur chacune des faces dégagées, de deux étages percés de fenêtres du même type que celle de la phase précédente, mais plus étroites. Au sud, une porte communiquait avec le couvent, la tour ayant servi de clocher à l'église des Dominicaines jusqu'en 1697.
La tour adjacente, massive (14 m de côté) et comportant 4 niveaux, a été érigée par étapes dès 1443 (planchers, escaliers et charpente formés de bois abattus entre 1462 et 1473) à l'initiative de la ville, fidèle aux Savoie et alors en conflit avec les Fribourgeois d'abord puis les Confédérés (guerres de Bourgogne). Cet ouvrage témoigne ainsi des premières adaptations des fortifications d'Estavayer à l'artillerie, ses meurtrières pouvant accueillir des couleuvrines ou de petits canons.
La reconstruction du pignon sud de la tour-porte et une reprise de la façade côté ville ont précédé les transformations du couvent dès la fin du 17ᶜ siècle. Au rez-de-chaussée, une porte d'accès à la tour du 15ᵉ siècle a été percée en 1762/63, soit un an après le remplacement des vantaux de la porte de ville.

Datation: dendrochronologiques, LRD04/R5321, LRD12/R6760.
SAEF, G. Bourgarel et Ch. Kündig; Service des biens culturels FR, D. de Raemy.