CN 1165, 573 400/194 850. Altitude 454 m.
Date des fouilles: 1990.
Références bibliographiques: S. Doiteau, ASSPA 72, 1990,197.
Fouille de sauvetage programmée (construction de la RN1). Surface de la fouille env. 700 m².

Habitat. La poursuite des investigations, ainsi qu'un premier tri des données et du matériel recueilli autorisent un diagnostic plus précis sur l'appartenance chronologique et culturelle du site. Fouillé sur env. 700 m², il occupe la bordure d'une cuvette marécageuse au sud du Lac de Morat, et présente l'intérêt de conserver les restes d'un habitat.

On distingue (fig. 8: le secteur central ici représenté correspond aux secteurs 6-11 de la fig. 7), sur 30-40 cm d'épaisseur, des amas assez denses de galets, qui dessinent un ensemble de bâtiments quadrangulaires, visiblement accolés. Le plus lisible d'entre eux comporte des cloisonnements internes, un foyer, entouré d'un amas important de dalles et blocs correspondant à un aménagement (cheminée?), et une petite fosse avec dépôt d'un crâne de bœuf. La quantité et la répartition des galets ou blocs, un nombre important de morceaux d'argile (brûlés) portant des traces de clayonnage, ainsi que la rareté des trous de poteau (fig. 8,13: renfort de faîtière probable), permettent d'envisager une architecture légère en bois et torchis, reposant sur des sablières basses et murets d'appui. Cette probable maison d'habitation est prolongée au sud-ouest par un autre bâtiment, moins facile à interpréter (érosion, aménagements en creux divers), mais que devrait éclaircir l'étude en cours (il n'est pas impossible qu'il s'agisse d'un four). L'ensemble est bordé à l'ouest par une succession de gros blocs, correspondant sans doute à une clôture, et par un réseau de petits fossés, se prolongeant jusqu'aux bâtiments. Ces derniers s'étendent vers le nord/nord-est (au sud: zone de rejets et marécage), avec une densité de galets et des alignements identiques, mais de lisibilité plus complexe.

La densité du matériel céramique (env. 5000 tessons) et osseux (env. 450 fragments) est de très loin la plus forte dans le secteur central (bâtiments et fosse st. 12, cf. fig. 7). Le reste du matériel se compose de quelques fusaïoles, bracelets en lignite de type large, de rares objets en bronze (bracelet fin type armille, épingle à tête enroulée), et de plusieurs scories qui attestent un artisanat métallurgique sur le site.

Notre impression de départ était de proposer une datation juste postérieure à celle d'En Chaplix (Ha C). La céramique (fig. 9) possède en effet les mêmes caractéristiques, mais un répertoire de formes et décors plus diversifié et une tendance évolutive perceptible (décors incisés, chevrons, lèvres festonnées abondantes et plus profondes).

La suite des fouilles et le remontage de céramiques viennent de livrer quelques exemplaires de coupes basses (fig. 9,8.9) à cannelures, lèvre éversée et profil en «S» marqué, qui s'avèrent très semblables à celles provenant de Châtillon-sur-Glâne, et datées de la seconde moitié du 6ᵉ s. av. J.-C. Une première datation C14 (bois fosse st. 3: 770-410 cal BC, moyenne: 590 BC) semble elle aussi rajeunir le site. La stratigraphie et la disposition des vestiges ne montrent pas, en tout cas, de double occupation. Réservons donc une attribution chronologique plus précise à l'élaboration ultérieure.

Nous ne connaissons pas, d'autre part, les limites spatiales de l'occupation, mais il s'agit vraisemblablement d'un hameau de faible envergure, à bâtiments très rapprochés, et de contexte économique rural. De proches investigations ont de plus mis au jour plusieurs sites attribués au Hallstatt récent, qu'il sera intéressant de confronter avec Derrière le Chaney.

Il semblerait donc que, malgré les différences chronologiques et culturelles, l'ensemble de la plaine Suisse occidentale ainsi que les bordures du Jura possèdent durant cette période (Ha C et D) un fond commun de productions céramiques d'habitat, qui se démarque assez nettement des ensembles antérieurs (Bronze final). Des caractères perceptibles au Ha C perdurent largement sur des sites plus tardifs (Wittnauer-Horn; Neunkirch-Tobeläcker: B. Ruckstuhl, ASSPA 72, 1989, 59-90), associés à des formes nouvelles très certainement produites par les centres économiques dominants.

De ces constatations découle une problématique de recherche, qui pourrait appréhender les intéressantes différences entre Hallstatt ancien/Hallstatt récent, céramique d'habitat/céramique funéraire, productions de sites importants/productions rurales.

Datation: archéologique, C14.
MHAVD, S. Doiteau.