CN 1165, 2575 737/1 201 462. Altitude 432 m.
Date des fouilles : février - avril 2023.
Fouille de sauvetage non programmée (rénovation et construction de nouveaux aménagements de la gare). Surface de la fouille env. 900 m².
Infrastructure, trouvaille isolée.

Le Service archéologique de l'État de Fribourg a procédé à une fouille d'urgence dans le cadre de la rénovation de la gare de Sugiez. La présence d'infrastructures ferroviaires n'ayant pas permis la planification de sondages préalables, le SAEF a donc effectué une surveillance des excavations et des fouilles ponctuelles pour documenter certains vestiges.
Pour ce projet, d'importants impacts sur le sous-sol étaient prévus pour la construction de passages souterrains et d'un réservoir de rétention d'eau. Ces travaux se sont déroulés à proximité de deux points de découverte de pilotis : sous l'ancienne gare (en 1902) et dans une tranchée plus à l'est (en 2018). Dans l'une des excavations de 2023, une pirogue monoxyle est mise au jour dans les sédiments d'un antique lit de la Broye, à plus de 3 m de profondeur.
L'humidité du lieu d'enfouissement a permis une bonne conservation de l'objet et a limité le dessèchement du bois. Les palplanches implantées sur le pourtour de l'excavation ont malheureusement sectionné l'embarcation en deux morceaux, dont seul un segment de 2.5 m a été prélevé. À l'instar de nombreux autres exemplaires, elle a été façonnée dans un tronc en chêne. Taillée dans un arbre de diamètre important, elle mesure environ 0.9 m de largeur pour une épaisseur supérieure à 0.2 m.
À l'intérieur, deux renforts transversaux bien marqués consolident les bouchains. Quant au fond de la pirogue, il comporte une mortaise quadrangulaire chevillée. Concernant les traces de travail, elles se situent majoritairement au niveau du bouchain bâbord. Il s'agit d'enlèvements assez larges, peu profonds et très érodés. Une datation dendrochronologique a permis de rattacher cette pirogue à l'âge du Bronze final (vers 1035 av. J.-C.).
Autour de cet esquif, environ 200 pilotis ont été mis au jour. Façonnés en chêne ou en différents bois blancs, ils se répartissent pour la plupart sur un axe nord-sud qui pourrait correspondre à l'orientation de l'ancienne Broye.
Les éléments en chêne sont les pièces dont les diamètres et les longueurs mesurés sont les plus importants. Le plus grand d'entre eux était encore conservé sur une hauteur de plus de 4.5 m pour un diamètre de 0.3 m.
Parmi le rare mobilier protohistorique récolté entre les pieux, signalons la présence d'un chêne travaillé. Il s'agit de l'extrémité proximale d'un bois refendu portant une profonde entaille perpendiculaire aux fibres courant sur les deux tiers du pourtour de l'objet. Obtenu par sciage, ce façonnage dégage le sommet du pieu à la façon d'un taquet d'amarrage. Deux datations radiocarbones réalisées sur des bois indiquent une fréquentation du lieu au cours de la période hallstattienne et à la Tène moyenne (pièce travaillée). Dans un horizon plus haut dans la séquence stratigraphique, quelques fragments de tegulae et de petits blocs de calcaires jaunes, découverts en position secondaire, appartiennent à l'époque romaine.
Ce n'est pas dû au hasard si l'ensemble des vestiges mis au jour lors de cette intervention se rapportent à des activités liées à la navigation. En effet, ces objets proviennent d'une zone proche de l'exutoire actuel du lac de Morat dans la Broye. Cette rivière, dont le tracé s'est régulièrement déplacé, a de tout temps constitué une voie de transit privilégiée pour relier les lacs de Neuchâtel et de Morat tout en permettant de traverser plus facilement les marais du Seeland.

Mobilier archéologique : pilotis, pirogue, tegulae.
Prélèvements : charbon de bois, bois.
Datation : dendrochronologique, C14. Âge du Bronze ; Âge du Fer ; Époque romaine.
SAEF, L. Kramer.